Les conteneurs de la drogue

Chaque année, des dizaines de millions de conteneurs sillonnent les océans. La grande majorité des échanges mondiaux se fait en effet par voie maritime. Une aubaine pour les narcotrafiquants. Ces derniers mois, de nombreux conteneurs bourrés de cocaïne ou d'héroïne ont été saisis dans les ports africains. 

Crédit: Getty Images/Alister Berg

En juin dernier, l'Office de répression du trafic illicite de drogue (Ocertid) au Bénin, a annoncé avoir mis la main sur une importante quantité de cocaïne au Port autonome de Cotonou. Selon la presse locale, 405 kg de poudre blanche étaient cachés dans un conteneur, arrivé le 23 mai dernier. La drogue était « soigneusement dissimulée dans de grandes valves métalliques de canalisation d'eau », affirme le quotidien Fraternité. D'après les médias locaux, la cargaison en provenance du Brésil appartenait à un riche homme d'affaire nigérian.

Le 13 juin dernier, les autorités colombiennes ont saisi dans le port de Carthagène un conteneur avec une cargaison de fertilisants agricoles dans lesquels se trouvaient 495 kg de poudre blanche à destination, encore une fois, de Cotonou. 

Ce type d’affaire est devenue banale sur les côtes africaines. Les 11 et 15 juin dernier, au port de Lomé, deux saisies successives de 96 kg de cocaïne chacune, dissimulée dans des palettes en bois dans un conteneur contenant des cartons d'huile de soja, ont été réalisées, cette fois au port de Lomé, au Togo. Un scénario similaire a été signalé le 22 juin  dernier - 141,5 kg de cocaïne à l'intérieur de bouteilles d'huile végétale - au port de Douala, au Cameroun. Le même type d'interception -275 kg en deux saisies- avait été réalisé au port de Lagos en janvier dernier.

Cette méthode est, en effet, banale pour les organisations criminelles qui l'utilisent pour acheminer de la cocaïne et d'autres drogues comme l'héroïne vers les marché européen et américains. D'après l'ONUDC, au total 1 tonne de cocaïne a été saisie dans des conteneurs, entre 2009 et janvier 2011 au Nigeria et au Ghana.

De grosses quantités de poudre blanche sont régulièrement découvertes dans les grands ports à travers le monde. En mars 2011, par exemple, les douanes françaises ont mis la main sur plus de 700 kilos de cocaïne au port du Havre, dissimulés dans un conteneur en provenance du Panama. Le même mois, 150 kg de poudre blanche ont été saisis en Roumanie dans un conteneur de bois en provenance de Bolivie.

Détection difficile

L'explication est simple. «  Plus de 90% des échanges mondiaux se font par voie maritime, et le trafic augmente. Cela rend l'utilisation des conteneurs très intéressante pour les réseaux criminels, et du même coup la détection plus difficile », déclarait Yuri Fedetov, directeur exécutif de l'ONUDC, en avril dernier. Selon l’organisation, 11% environ de la cocaïne saisie en Europe en provenance d'Amérique latine arrive par ce biais.

Les services des douanes distinguent plusieurs manières de transporter la drogue par conteneur. La première consiste à introduire la cocaïne dans les produits qui se trouvent à l'intérieur (à l'intérieur de tubes, mêlée à des blocs de ciment, dans des bidons d'huile de palme, voire tout simplement dans des palettes...). Deuxième possibilité: cacher la drogue dans les structures même du système de réfrigiration. Enfin, les trafiquants utilisent fréquemement la méthode dite du « ripp off ». La poudre blanche est placée dans un sac à l'entrée du conteneur au port de départ, pour être facilement accessible et récupérée à l'arrivée, ce qui suppose bien sûr des complicités. « Des plombs [qui servent à sceller les conteneurs] peuvent sauter et être remplacés », souligne un policier des « stups ».

Il y a ensuite plusieurs cas de figures. « Soit le commanditaire des conteneurs sait qu'il y a des stupéfiants à l'interieur, soit il ne le sait pas. Il arrive que des commerçants de bonne foi découvrent de la drogue dans un conteneur. Cela arrive souvent en Europe avec les conteneurs de bananes en provenance d'Amérique latine, poursuit le policier. Soit les narcotrafiquants envoient de grosses quantités dans un conteneurs, soit de petites quantités en plusieurs envois. »

Le problème, reconnaît-il, « c'est que 2 à 3% des conteneurs sont ciblés et une quantité infime sont effectivement contrôlés ». Dans les ports où les contrôles sont les plus draconiens, lorsqu'il ciblent un conteneur, les douaniers examinent à la loupe les documents qui l'accompagnent, notamment bien sûr la provenance, le type de marchandise, afin de vérifier si la nature de cette dernière correspond bien à ce qu'exporte traditionnellement le pays de départ. Dans de rares cas, ils ouvrent les conteneurs pour en vérifier le contenu.

Scanners

Des systèmes de scanners visant à accélérer et  faciliter le contrôle de ce qui se cache dans les conteneurs sont, par ailleurs, installés dans certains ports. En 2003, l'Organisation mondiale des douanes et l'ONUDC ont lancé un programme pour équiper les ports de pays en développement comme le Sénégal, le Ghana et l'Equateur. « Mais on ne peut pas scanner tout un cargo, constate le policier anti-drogue. A cela s'ajoute le fait que dans les pays du tiers monde où ces scanners ont été installés se pose le problème de l'entretien, voire d'incidents volontairement provoqués pour qu'ils ne fonctionnent pas...» Sur les ports africains, comme dans d'autres région du monde, les pots-de-vin sont la meilleure manière de rendre certains douaniers moins regardant...

Les conteneurs restent donc, aux yeux des trafiquants, l'un des moyens les plus simples et les moins coûteux pour acheminer leur marchandise. Au point que les services de lutte contre le trafic de stupéfiants surveillent de près les projets de développement portuaires à travers le monde qui constituent toujours de nouvelles opportunités pour les barons de la drogue. 

8 Comments

Vous savez qu'en ce moment en Afrique, les ports commerciaux sont les plaques tournantes des trafiquants . Et surtout dans ses pays ou les conteneurs arrivent à longueur de journée.Des pays comme la Gambie, le Sénégal, la Mauritanie et la Guinée Bissau c'est ça des pays à surveiller par tous les moyens. Car l'argent qui circule dans ces pays , les châteaux et chalets qui y poussent tous les jours? Je pense qu'il y a de quoi se poser des questions très, très profondes.

Toute la bande sahelo-saharienne est devenue un boulevard international de la drogue. Des 4x4 l'écument dans tous les sens comme s'il n'y a aucun gouvernement pour la surveiller. Pourquoi d'ailleurs? Parce que cela est tout simplement impossible en raison de l'immensité des zones à contrôler et de la maigreur des ressources de nos états qui ne parviennent même pas à couvrir nos besoins alimentaires. Ce qui est certain, c'est que les populations locales n'ont pas les moyens d'acheter cette drogue pour la consommer. Ceci implique en tout cas que le Sahara sert juste d'aire de transhumance pour les trafiquants; leur clientèle étant sans doute vers l'Asie ou l'Europe. La meilleure façon de tuer ces trafic serait sans doute de démentaler ses sources c'est a dire les les industries qui produisent ces drogues. L'Afrique n'est qu'un maillon de cette chaine funeste. il faut couper le mal à sa racine.

J'ai habité en Afrique et y ai consommé des drogues. Je peux vous dire que tout les niveaux du pouvoir qui sont censés empêcher le trafic sont corrompus jusqu'à la moelle. Ils sont payé directement par les plus gros trafiquants qui leurs versent plus de dix fois leurs salaires en une fois. Ensuite, ils leurs font la révérence bien bas et ça,je l'ai vu de mes yeux vu!!!

Il y a eu un film grandeur nature au Bénin sur des destructions de quantités de drogues récemment. La ministre de la justice , actrice principale du film a certainement une bonne volonté et je la soutiens. Mais elle a oublié que la gangrène est installée dans le pays depuis au moins 20 ans. Alors pour guérir de ce mal, ce sera difficile car les dealers aiment l'argent facile et aussi rouler carrosse. Leurs complices sont très hauts placés, il sera difficile de faire quoi que ce soit à cause de la misère et de la corruption. Ici tout s'achète même la vérité.

A Lomé, ici, très souvent les autorités montrent ces saisies à la télévision.
Mais, comme le demande Dzigboded, nous restons sceptiques quant au sort qui est réellement réservé à ces drogues saisies.
Il faut qu'il y ait une transparence à ce sujet. Car il ne sert à rien de dépouiller les plus faibles au profit des trafiquants officiels.

M. champin, au Bénin, le trafic de drogue bat son plein au vu et au su de tout le monde. les dernières incinérations ordonnées par le chef de l'Etat ne sont que poudre aux yeux. Souvent, la drogue est remplacée. Mais ce qui est inquiétant, c'est que vous avez des gamins qui roulent des carrosses alors qu'ils ne font rien et deviennent subitement riches. La drogue passe les frontières et les plus grandes autorités sont complices. Je n'en dirai pas plus car, c'est aussi une question de vie ou de mort. Comme on le dit en Afrique, c'est pas dans ma bouche tu vas manger piment. c'est à dire c'est de moi que tu tireras la vérité
Ciao

heureux que les pays africains renforcent leur sécurité dans le domaine portuaire ce qui a pour sûr abouti a ce résultat.

Les drogues saisies sont-elles réellement détruites ou finissent en matières premières commerciales des autorités compétentes qui trouvent dans ces saisies le moyen d'approvisionnement le plus sûr ?